04/07/2011
Mauritanie

La capitale exposée aux inondations maritimes

Depuis cinq ans des habitants de Nouakchott voient les eaux
souterraines jaillir du sol pour envahir leurs domiciles, dans certains
quartiers, et transformer leur environnement en zones marécageuses
inhabitables. En 2007, des inondations limitées étaient constatées dans
certains endroits, notamment pendant l'hivernage, avant de prendre la
forme d'une catastrophe naturelle en 2011, suite au pompage des eaux
drainées à partir du fleuve Sénégal, à l'accroissement de la nappe
phréatique à cause de la montée de l'océan Atlantique et de l'absence
d'assainissement. En janvier 2011, les eaux ont commencé à envahir
plusieurs quartiers comme Socogim PS, Bagdad, Sebkha et Las Palmas, où
la grogne prend forme, avant de prendre de l'ampleur en avril.
Contraints à l'exode, ces habitants réclament, sans grand succès
jusqu'ici, des indemnisations à l'État et aux sociétés immobilières qui
avaient, au départ, viabilisé les sites aujourd'hui inondés. Cette
dimension sociale du problème a amené le président mauritanien Mohamed
Abdelaziz à visiter les sites en avril 2011 et à créer, le même jour, un
comité interministériel pour se pencher sur la question. Mais le comité
n'a pas encore livré ses propositions de solutions aux conséquences
environnementales et sociales du problème.

Les avis sont partagés sur la question de savoir si Nouakchott pourra
résister à ce phénomène. Experts en environnement, en urbanisme et en
assainissement l'expliquent différemment alors que les organisations non
gouvernementales, les agents immobiliers et les victimes des
inondations ont, eux aussi, leurs propres approches. L'État croit à une
solution à travers le Programme spécial de sauvegarde de la ville –
PSPVN, financé pour quelque huit millions de dollars, et qui comprend
une composante littorale et végétale. Le coordinateur du PSPVN, Bamody
Diakité, met d'abord en cause les quelque 120 000 m3 d'eaux
drainées à partir du fleuve Sénégal pour être traitées avant d'alimenter
Nouakchott, mais dont une bonne partie se perd par terre à cause de la
vétusté des conduites d'eau. Il dénonce ensuite l'absence de réseaux
d'assainissement, affirmant que ces facteurs accentuent le phénomène de
la montée des eaux vers la ville.

Le responsable du projet adaptation aux changements climatiques et
côtiers en Afrique de l'ouest, Dr Marico Demba, affirme que des
quartiers, situés en dessous du niveau de la mer, sont bâtis sur une
nappe marine, estimant que l'adaptation aux changements climatiques
nécessite des moyens dont le pays ne dispose pas. Le directeur du
contrôle environnemental, Ould Lefdal, confirme cette opinion,
soulignant que la ville de Nouakchott se situe dans une dépression de
0,5 à un mètre en dessous du niveau de la mer. Il ajoute que la mer
avance vers la ville à raison de 25 mètres par an. L'autre aspect de la
menace des eaux s'explique par le poids de l'action de l'homme. À cet
égard, Diakité, du PSPVN, dénonce l'usage du sable marin pour la
construction des bâtiments, qui a ouvert 18 brèches sur le cordon
dunaire sur la plage. Pour colmater ces brèches, plusieurs études ont
été faites. La plus réalisable, l'endiguement marin par le biais du
dragage de la mer pour renforcer le cordon dunaire, fera prochainement
l'objet d'un appel d'offres, selon Diakité.

Med Abderrahmane, IPS (Nouakchott) – AllAfrica 23-06-2011